LA GRANDE ENTREVUE
PIERRE PELOTEAU, PRÉSIDENT DE L'APPQ

25 novembre 2004

 

Pour la troisième année consécutive, nous présentons en cette fin d'automne la deuxième longue entrevue de fond avec les dirigeants des parties patronale et syndicale.

Comme nous avons débuté cette année avec Richard Amnotte, c'est au tour de Pierre Peloteau, président de l'APPQ de s'entretenir avec le rédacteur en chef de spiq.ca, Christian Thibault.

Bonne lecture !

 


C.T. : Monsieur Peloteau, bonjour !

P. P. : Salut Christian

C. T. : La proposition de schéma de risques a été déposée, les consultations publiques sont terminées: est-ce qu'on peut parler d'une nouvelle ère pour le Service de protection contre les incendies de la ville de Québec?


P. P. : Eh, oui on peut parler d'une nouvelle ère à la condition seulement et uniquement qu'on applique ce qu'on a déjà déposé comme travail au niveau du schéma de couverture de risques. Pour l'instant on peut dire que ça s'annonce mal encore parce qu'il y a eu des grosses nouvelles effectivement le 14 octobre dernier en comité plénier à la ville de Québec: déjà à ce moment-là, on annonçait les intentions de la Ville de Québec de mettre en place un service d'incendies avec des effectifs.

Sur le coup, oui, effectivement, ça semblait un dossier tout de même assez intéressant. Cependant après avoir regardé attentivement le schéma proposé, la couverture proposée, on s'aperçoit qu'il y a encore beaucoup de lacunes dans ce travail. Effectivement, on a remplacé toutes les pompes-échelles pour mettre en devoir une pompe et une échelle. La problématique qu'on rencontre là-dessus, c'est qu'on utilise des échelles à un homme seulement, quand on sait que normalement, minimalement partout en Amérique du Nord, on travaille avec un minimum de 3 à 4 personnes sur ces véhicules-là . On retrouve généralement sur ces véhicules les équipes de ventilation: il ne semble pas à Québec qu'on veuille utiliser le personnel de cette façon, ce qui entraîne aussi d'autres problématiques.

Également, le 14 octobre dernier, on avait annoncé une série de mesures immédiates qui devaient être mises en application à tout le moins au courant du mois de décembre, avant la période des Fêtes selon ce qui avait été annoncé. On est forcé de constater qu'on est rendu au mois de décembre et il n'y a encore aucune mesure concrète qui a été appliquée jusqu'à maintenant ou annoncée officiellement pour le mois de décembre. Donc c'est clair que les 60 pompiers qui avaient été annoncés par la Ville de Québec pour le mois de décembre ne seront pas là encore une fois. On a reporté çà dans le temps; on débute tout simplement, de ce qu'on m'a annoncé récemment, même on l'a dit publiquement, l'embauche de 44 pompiers au cours des 6 prochains mois et tout ça ne débutera pas avant le 15 février prochain.

C.T. : Vous avez justement, Pierre, rencontré la Ville ces jours derniers et c'est comme si on sentait un petit peu que vous étiez un obstacle à l'application des mesures immédiates...

P. P. : Effectivement Christian. C'est toujours le jeu de la Ville de Québec de dire que c'est l'association et que ce sont des problèmes de négociation. Dans le cas des pompiers, quand on a commencé à dénoncer certains incendies en 2002, on disait que c'était un jeu de négociation: donc, déjà en 2002, c'était la position de la Ville de Québec. Tout au cours de la dernière année, la Ville de Québec s'est farouchement opposée à nos déclarations, à notre position, à nos prétentions en disant que ça ne tenait pas la route, qu'on faisait des campagnes de peur, pour maintenant s'apercevoir qu'on a un Service qui est en très grande difficulté présentement à pouvoir desservir adéquatement la population, assurer la sécurité des citoyens et de même réaliser que les pompiers travaillent de manière à mettre à péril leur sécurité depuis trop longtemps déjà.

C. T. : Mais, vos sorties publiques au cours de la derrière année, sorties qui, il faut le dire, on été aidées par quelque incendies significatifs, ont certainement aidé à façonner le schéma de risques tel que présenté: est- ce que vous en êtes conscients de votre apport de ce coté-là ?

P. P. : Pour nous, ce qui est clair c'est que depuis longtemps on savait qu'on avait des lacunes importantes au niveau du Service: on se disait que le schéma de couverture de risques viendrait mettre un pansement à toute cette problématique étant donné qu'on se devait maintenant d'encadrer le Service incendie avec les nouvelles orientations ministérielles.

Cependant, en cours de route, lorsqu'on a eu l'étude de schéma de couverture de risques on s'est aperçu au fil du temps qu'on commençait à nous tasser de là, (à ce moment nous faisions partie de l'étude faite par Roche) et à nous limiter l'accès à l'information qui était disponible; et on ne voulait pas nous présenter toute l'ensemble des données. C'est donc à ce moment-là que nous nous sommes dit que c'était assez et qu'il fallait réagir.

On a mis en place une stratégie qui faisait en sorte qu'on dénoncerait systématiquement à la population toutes les lacunes quotidiennes qu'on pouvait rencontrer et Dieu sait qu'il y en a eues au cours de la dernière année. On avait dans le passé avisé la population qu'on aurait des problèmes puis la dernière année a fait en sorte de démontrer hors de toute doute qu'on a de sérieux problèmes à répondre de façon adéquate à la population.

Il faut savoir que la prétention de la Ville a toujours été, comme elle l'avait annoncé dans sa circulaire lors des fusions, qu'on donnait un service à tous les citoyens à l'intérieur de 5 minutes avec des pompiers permanents et temps partiel. Donc le citoyen, lui, croyait avoir un bon service incendie, et c'était ce que véhiculait la Ville de Québec. Donc c'étaient des faussetés tout simplement, puis nous nous sommes dit que c'était assez les faussetés véhiculées par la Ville. C'est la raison pourquoi on a agi dans ce sens là au cours de la dernière année.

C. T. :D'une (ça, c'est mon image) Chevrolet Cavalier avec laquelle on aboutissait à l'étude Roche, on peut certainement dire qu'on abouti à une Mazda 3 avec le schéma: vous n'êtes pas content de ça ?

P. P. : C'est clair qu'il faut reconnaître qu'il y a une amélioration importante qui va être apportée au Service , sauf que ce qui est dommage et ce qu'on avait prévu même avec nos discussion avec le Ministère de la sécurité publique il y a déjà plusieurs années, c'est que la Ville de Québec présente un schéma de couverture de risques qui va atteindre seulement le minimum des objectifs à atteindre par la loi. Donc on ne veut pas élever d'un cran le service offert à la population.

Donc avec le présent plan, malgré tout le personnel pompier qui va être ajouté, soit une quarantaine par quart de travail, on va avoir un effectif de 101 pompiers en devoir plus quatre chefs. Ca va faire en sorte qu'on va être en mesure de répondre efficacement aux risques faibles seulement sur le territoire de la Ville de Québec. Donc, ça veut dire quoi çà ? C'est que pour les risques moyens, élevés et très élevés, il n'y a eu aucune attention portée par le schéma de couverture de risques. Ce qui nous amène donc à dire qu'on a toujours des problèmes au niveau des centres commerciaux, des usines, des résidences de personnes âgées ainsi que les quartiers centraux et le patrimoine de la ville de Québec.

Et puis, ce n'est pas seulement l'Association qui le prétend: c'est même l'étude des chefs qui avait été rendue disponible au courant de l'année 2003. Les chefs le disaient également que c'était seulement pour un risque faible, donc, c'est clair qu'on n'est pas en mesure encore une fois de pouvoir répondre adéquatement pour tous les risques moyens, élevés et très élevés sur l'ensemble du territoire de la Ville de Québec et plus particulièrement dans le centre-ville et tout ce qui longe le fleuve, les quartiers centraux de Québec.

Et ont sait pertinemment présentement et la Ville de Québec le sait parce qu'il y a des études à l'appui qui viennent corroborer çà, qu'il y a des problèmes importants au niveau de la prime d'assurances pour les résidents qui font partie des quartiers centraux. Malgré une prévention importante, malgré de très bons résultats au niveau des pertes certaines années, ce qu'on s'aperçoit c'est qu'il peut y avoir des pertes très importantes d'une année à une autre dans n'importe quel secteur de la Ville de Québec ce qui démontre assez clairement que notre Service des incendies peut parfois, à certaines occasions être complètement dépassé par les évènements pour répondre à un incendie de façon adéquate et subir des pertes de deux, trois millions assez facilement dans n'importe quel secteur.

C. T. :Par contre, tu vois... on vient de passer trois séances de consultations publiques auxquelles en tout et partout peut-être cinquante citoyens ont assisté. Déjà, lors du dépôt du dernier budget, on a indiqué que les fameuses économies qui devaient être faites avec les fusions ne se réaliseraient pas, entre autres, parce que ça va coûter plusieurs millions supplémentaires pour le service des incendies. Pensez-vous qu'avec cela on pourrait perdre un certain momentum et que même ce qui est proposé dans le schéma de risques pourrait être en danger d'application?

P. P. : De un, c'est la loi et la Ville de Québec doit se conformer à tout le moins aux orientations du Ministère: si elle ne les rencontre pas, on va avoir un sérieux problème !


Deuxièmement, au niveau du budget, tu m'as parlé tout à l'heure des prévisions d'économies qu'on avait faites il y a déjà plusieurs années. J'ai le document ici au bureau, la fameuse présentation qui avait été faite par Henri Labadie et Hervé Brosseau. Ces personnes avaient travaillé sur ce dossiers-là en ajoutant des casernes de 2 pompiers un petit peu partout sur le territoire avec des temps de course qu'on avait planifié autour de 80 km/h sur l'ensemble du territoire; également, on ne calculait pas à ce moment le temps de préparation ni le temps de traitement de l'appel. Également, on faisait des moyennes avec les temps de réponse. Donc, on coupait par deux les temps de réponse.

Donc c'était une étude qui était plus que mal faite, elle était complètement irréaliste. Puis on s'est basé là-dessus pour démontrer aux autres banlieues à l'époque qu'on était pour faire des économies importantes. Point à souligner, les villes de banlieues avaient fait faire à l'époque, par la firme Grant Thornton une petite expertise de tout ça et demandé des informations concernant les économies avancées par le Ville de Québec: la firme était venue justement à la conclusion qu'il était complètement farfelu, complètement impossible de prévoir des économies surtout lorsqu'on fusionne plusieurs villes. Comment peut-on améliorer un service lorsqu'on diminue le nombre de pompiers au pied carré, c'était complètement irréaliste!


Pour revenir aux consultations publiques, j'étais présent, pour l'ensemble des gens qui ont été à ces réunions-là, il n'y a pas eu vraiment de problématique au niveau du budget. Ce que les gens veulent avoir c'est un bon service en général. Ils veulent savoir oui, si il va y avoir des hausses, cependant ce qu'on comprenait du message qui était lancé, c'est que oui c'est un service essentiel et qu'il faut mettre l'argent nécessaire pour le service incendie.

C. T. :Mais comment est-ce qu'on peut expliquer çà, Pierre, qu'il n'y ait pas plus de monde qui se soit présenté à çà? Trop technique?

P. P. : Bien, de un, oui c'est assez technique, mais je pense que peu importe la population, il y a beaucoup de gens qui n'ont plus le temps le soir de se présenter à des rencontres à cause de leurs obligations familiales. Il n'y a pas eu non plus beaucoup d'annonce de la Ville de Québec pour présenter son schéma de couverture de risques: ont a trouvé seulement des annonces officielles, de ce que j'ai vu, dans les journaux locaux de chaque banlieue et sur le site internet de la Ville. Il y a eu au cours des derniers mois, à ma connaissance, trois si ce n'est pas quatre consultations publiques, coup sur coup, cet automne. Il y en a eu pour la police, pour le P.T.I., donc je ne crois pas que les gens, semaine après semaine, on le goût de se présenter dans un conseil d'arrondissement pour pouvoir obtenir des informations là-dessus.

Egalement, je te dirais pourquoi il n'y a pas eu plus d'une cinquante de personnes: on a fait seulement trois rencontres dans trois arrondissements, une à Ste Foy, une à Loretteville et une à Charlesbourg. Comment est-ce que les gens de Limoilou qui n'ont pas de transport en commun font pour se présenter? Pourtant les gens de Limoilou avaient leur mot à dire, parce qu'ils n'ont rien obtenu de plus dans le présent schéma de couverture de risques. À part que oui, il va y avoir beaucoup de pompiers disponibles pour venir un peu plus tard sur les incendies, mais pour les risques moyens, élevés et très élevés, ces gens-là ont été complètement mis de côté. Et je pense qu'ils avaient un certain droit de parole et que ces gens n'ont pas eu un la chance de pouvoir s'exprimer.

Il restait un point à souligner: quand on me parle de hausse de prix, il n'y a pas personne qui aime çà payer plus cher, que ce soit la livre de beurre ou la pinte de lait. Cependant, moi en tant que président de l'Association, ce que je dois mentionner là-dessus, c'est que le Service, à la Ville de Québec, ne représente seulement que 2.8% du budget annuel de la Ville sur un budget total de 830 millions présentement. Donc, le service d'incendie de Québec a un budget de 28 millions au niveau salarial; si on compte les casernes, l'entretien des casernes, les véhicules et leur entretien, on fait monter le budget à 38 millions de dollars. Si on compare le Service des incendies de Québec, c'est clair qu'il y a beaucoup moins d'argent qui est inverti dans la sécurité-incendie à Québec que dans les 10 autres plus grandes villes canadiennes comparables à la Ville de Québec. Çà, c'est plus que clair! Même la ville de Halifax qui a 425 000 de population et un territoire 4 fois plus grand qu'ici, a à l'heure actuelle, près de 450 pompiers permanents et 1000 temps-partiels. Nous ce qu'on dit c'est "redonnez-nous la part de budget que vous avez coupée au cour des dernières années, vous avez coupé drastiquement au niveau du budget du service des incendies".

Il faut aussi comprendre, qu'avec les dernières fusions, on a incorporé des villes de banlieue qui n'avaient pas de service d'incendie, pas de budget investi de façon adéquate là-dedans. Au cours des 10-15 dernières années, la Ville a grandi beaucoup, a eu une évolution importante au niveau de l'étalement urbain: des jeunes familles sont parties habiter les secteurs de Beauport, par exemple. Même chose au niveau commercial, ça s'est développé énormément. Donc, on n'a pas fait face à la réalité des dernières années.

Mais je te dirais en terminant qu'il ne faut pas oublier non plus que lorsque M. Lallier, en 2001, courtisait les autres villes, courtisait le gouvernement lorsqu'il parlait du schéma de couverture de risques, il demandait à ce moment-là de faire rapidement, d'imposer aux villes, une obligation de réagir rapidement au niveau de la sécurité incendie. Même qu'à ce moment là, M. L'Allier riait d'une ville comme Lac St-Charles qui offrait un service qui se donnait comme il y a 50 ans, disait-il, avec des pompiers à temps partiel.

Lorsqu'il a courtisé les citoyens de la nouvelle ville de Québec lors des fusions municipales, Monsieur L'Allier a clairement proclamé l'équité du compte de taxes et l'équité des services également. C'était sa devise numéro un qu'il a répétée jour après jour sur toutes les tribunes qui s'offraient à lui! Donc, maintenant c'est le temps d'agir et de donner un service à la population. À ce moment là, M. L'Allier parlait d'un délai d'intervention de 4 minutes: on est en plein processus de schéma de couverture de risques et il tarde toujours à le faire, c'est ce qu'on déplore, l'attitude de notre administration.

 

C. T. : Une insatisfaction engendrée par le schéma de couverture de risques est l'échelle aérienne à un homme: dans le contexte d'une négociation de convention collective, avez-vous encore du jeu si on veut vous imposer des choses avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord dans le schéma ?

P. P. : C'est évident, que pour nous, en négociation de convention collective, on va s'assurer que la sécurité des pompiers soit assurée, tout simplement. Donc, si on n'est pas en mesure de confirmer que la sécurité des pompiers est assurée sur certaines procédures de travail qui vont être appliquées par la Ville de Québec, c'est sûr et certain que l'Association prendra tous les moyens nécessaires lors des négociations pour s'assurer que la sécurité de ses membres est garantie. On ne fera pas une entente sur le dos de la santé-sécurité!

C. T. : Parce que santé et sécurité a été un point par lequel vous avez obtenu gain de cause par la passé. On pense aux ARA, aux appareils de communication...

P. P. : Je te dirais également la surcharge des véhicules incendie qu'on a connu dans le Service. Cette semaine justement on a obtenu une décision concernant le travail des pompiers à temps partiel.

Oui, on a pris de l'expérience au courant des dernières années et on s'est appliqué à travailler de façon importante au niveau de la santé et sécurité afin de faire appliquer les règles de l'art dans l'exécution de notre travail. À Québec, dès les premiers jours de notre travail, on a appris des mauvaises habitudes sur certaines pratiques dans l'exécution de ce travail. On avait l'habitude de pénétrer à l'intérieur des bâtiments en quantité de pompiers insuffisante. S' il arrive malheur lors de nos incursions à l'intérieur d'un bâtiment où il y a un incendie en progression et qu'il n'y a pas de " back-up " nécessaire à l'extérieur pour porter assistance à ces gens-là, on s'expose à des situations qui peuvent devenir dramatiques parfois. On a vu souvent des pompiers pénétrer à l'intérieur sans jet de protection, sans appareil respiratoire et vouloir aller le plus loin possible pour pouvoir constater ou faire l'évacuation de citoyens. Ce n'est pas la façon correcte de travailler; il y a tellement d'accidents en Amérique du Nord, il y a peut-être une centaine de pompiers qui décèdent année après année. C'est facile pour nous de comprendre maintenant qu'il est important de travailler de façon sécuritaire puis, il y a également les normes 1500 et 1710 de la NFPA qui sont très importantes aussi.

C. T. :On est rendu où avec la négociation, est-ce amorcé, le dépôt de vos demandes a-t-il été fait?

P. P. :Oui effectivement, le 16 octobre dernier le cahier de demandes a été déposé officiellement à la Ville de Québec. On avait prévu le 16 novembre dernier, la première rencontre à cet effet-là; cependant quand on est arrivée à cette rencontre, il n'y a pas eu de rencontre au niveau de la convention collective, la Ville de Québec voulait discuter des mesures immédiates, de l'implantation des mesures immédiates. Nous avons dû rebrousser chemin cette journée-là parce qu'on n'avait pas le bon comité: je n'ai pas besoin du procureur de l'association pour les mesures immédiates.

C. T. : Compte-tenu que le temps passe, pour vous, c'est quoi une limite acceptable pour commencer vraiment à négocier ?

P. P. : On a acquis de l'expérience au cours des dernières années: ça a pris 5 ans à régler la dernière convention collective. Finalement on avait signé une convention qui était en vigueur seulement pour une douzaine de mois. C'est dommage parce qu'on est toujours considéré comme en période de négociations. Présentement ce n'est pas débuté officiellement, faut pas se le cacher, on devrait amorcer çà de façon plus rigoureuse au courant du mois de décembre.

C. T. : Là on va aboutir à une seule et unique convention pour tout le monde ?

P. P. : Oui, c'est la loi, qui nous y oblige.

C. T. : Vous avez eu une entrevue avec André Arthur le lendemain de l'incendie au Village de l'Anse: suite à cette entrevue là, il y a un pompier à temps partiel qui a appelé l'animateur pour dire, grosso modo sans citer ses paroles, que le syndicat ne défendait pas du tout l'intérêt des temps-partiels. Qu'est ce que le président du syndicat a à répondre à çà ?

P. P. : En quelque sorte, après trois ans d'inaction de la part de l'employeur dans le dossier, toutes les promesses que l'employeur a faites a l'ensemble de ces salariés , font en sorte qu'il y a une accumulation importante de frustration du personnel à temps partiel. Pour avoir entendu les propos de cette personne, moi ce que je dis là-dessus, c'est que c'est complètement faux. Parce que depuis le tout début, c'est clair que l'Association croyait seulement et uniquement à un service de pompiers permanents dans la grande région de Québec.

Il faut aussi comprendre qu'il y a deux types de pompiers temps à partiel présentement. Il y les pompiers à temps partiel formés avec les 27 modules, qui eux désirent faire carrière comme pompiers permanents à la Ville de Québec. Puis, il peut y avoir également des pompiers d'expérience, n'ayant pas nécessairement les modules de formation...

C. T. : Modules exigés par la loi ?

P. P. : Qui sont exigés par la loi pour ceux qui sont embauchés par une ville après 1998. Ces pompiers ont déjà un travail intéressant à l'extérieur du service d'incendie et pour eux, le travail incendie est une passion et également un petit à-côté, un gagne-pain supplémentaire pour arrondir les fins de mois.

Donc ce que je comprends dans les affirmation de cette personne-là, puis c'est ce que j'ai ressenti, c'est qu'il y a une frustration oui, parce qu'il dit qu'il n'est pas défendu présentement. Pour quelles raisons ? Peut-être parce que j'ai annoncé mes couleurs...que je ne croyais uniquement qu'aux pompiers permanents. La raison est fort simple: si on veut avoir 4 pompiers en 5 minutes et 10 en 10 minutes, on ne peut pas avoir ces résultats avec des pompiers à temps partiel: c'est la seule et unique raison.

Je n'ai absolument rien contre les pompiers à temps partiel, bien au contraire !

Je pense que ces gens-là présentement sentent que le tapis est en train de leur glisser sous les pieds, qu'ils vont devoir peut-être perdre cet à-côté-là. C'est clair que pour eux, ce sera la fin d'une passion qu'ils pouvaient vivre avec ce travail.

C. T. : Ce sont les règles qui sont ainsi ?

P. P. : Exactement et elles ont été fixées il y a fort longtemps, donc on ne peut pas les contourner. Et il y avait à cette époque-là l'histoire entourant le processus de sélection à la Ville: ce dossier, au moment où on se parle, vient justement d'être réglé.

La Ville a annoncé finalement qu'elle revenait à l'ancien processus de sélection qu'elle avait appliqué pour les deux premiers groupes: entrevue, examen médical, examen physique pour les candidats que ne l'ont pas fait au cours de la dernière année.

C'est donc clair qu'il y avait des frustrations chez certaines personnes et je comprends cela. Connaissant l'incertitude que vivent certains à l'heure actuelle, c'est normal qu'il y ait démontration de signes d'impatience à l'occasion.

C. T. : Il y a eu changement de garde à la Direction du SPCIQ: Quelle est votre opinion de Richard Amnotte et quelles sont vos relations avec lui ?

P. P. : On ne peut pas dire qu'on a de mauvaises relations jusqu'à maintenant. Ce que je déplore cependant, c'est le peu de rencontres et de discussions que nous avons pû avoir au cours des 6-7 derniers mois, depuis la nomination de Monsieur Amnotte. Je comprends qu'il a été occupé de façon importante pour la préparation, l'élaboration du schéma de risques, je comprends cela.

Ce que je déplore, par contre, c'est le manque de consultation qui a été faite jusqu'à maintenant: on n'a pas consulté l'Association pour la présentation finale du schéma bien qu'on m'avait mentionné que nous le serions et que nous pourrions émettre une opinion claire si on décelait des problématiques particulières. Nous avons appris, en même temps que tout le monde la proposition lorsqu'elle a été rendue publique: je déplore cela.

Nous n'avons pas de mauvaises relations: on ne se parle pas pour l'instant non plus! Mais je pense par contre que Monsieur Amnotte a une vision quand même beaucoup plus large que son précécesseur au niveau d'un service d'incendie. De ce côté-là, c'est de bonne augure: on risuqe de s'entendre mieux qu'auparavant sur certains points.

C. T. : Est-ce que vous entrevoyez une négociation difficile ?

P. P. : Je suis prêt à toute éventualité. Je souhaite que ce soit par contre une négociation la plus facile possible.

C. T. : Les citoyens souhaitent certainement qu'il n'y ait pas en plus de problèmes à ce niveau après tout ce qui a été vécu au cours des derniers mois...

P. P. : On constate que la population, avec les récents conflits de travail, n'apprécie pas les problèmes engendrés lors de l'exercice de moyens de pression. En tant que service d'urgence, nous sommes assez limités à ce niveau même s'il y a des moyens de pression qui peuvent être faits si les pompiers jugent que la situation le requière pour démontrer le mécontentement accumulé au cours des dernières années à cause de l'inaction de la Ville de Québec: présentement, ce qui engendre beaucoup de frustration, c'est l'inaction de la Ville.

On ne peut pas dire que ce sont les négociations qui niaisent ou qui retardent ou qui apportent des embûches parce que présentement, il n'y a pas de négociation.

On attendait le schéma de couverture de risques parce qu'il était important pour nous de savoir ce qu'était l'avenir de notre Service pour pouvoir oser espérer une négociation de convention collective ! Je n'étais pas pour négocier des conditions de travail de pompiers à temps partiel s'il était pour ne plus y en avoir.

À partir du moment où la version finale du schéma va être acceptée par le gouvernement, on va vraiment être en mesure, d'un côté comme de l'autre d'amorcer cette négociation sur une base établie.

Notre gros point de confrontation, le point de départ de nos problèmes a toujours été l'effectif: à partir du moment où ce point est réglé par le schéma de couverture de risques, il ne reste uniquement que la convention collective à finaliser, soient les avantages sociaux, le salaire et le reste...

C. T. : Le maire Lallier a déjà annoncé ses couleurs sur le salaire... pas de parité avec Montréal !

P. P. : L'histoire de la parité, ça m'importe peu ! Parité salariale n'a pas le même impact que rémunération globale. Il faut savoir que les pompiers de Québec sont presque identiques avec Montréal au niveau du salaire de base, donc ça ne change absolument rien.

C. T. : La dernière entrevue que nous avions faite ensemble remonte à juillet 2003 et vous me disiez en guise de conclusion que vous étiez " ben, ben, ben tanné ". Est-ce que ça va mieux aujourd'hui ?

P. P. : On ne peut pas dire que l'Association est aujourd'hui en mauvaise posture: il y a eu au cours des derniers mois de bonnes nouvelles qui venaient confirmer toutes nos prétentions, tous les risques que nous avions dénoncés.

Les événements ont fait en sorte que le rapport Delage est venu confirmer nos avancés ainsi que plusieurs personnes qui nous ont donné raison dont Gordon Routley qui s'est impliqué dans l'étude Roche, André Savard qui appuie sans réserve l'Association dans ses démarches, Monsieur Roméo Noël que l'APPQ s'est adjoint comme conseiller-expert et le directeur actuel du SSIM, Monsieur Alain Michaud qui est venu corroborer à 100% le langage qu'on tient envers la Ville de Québec, les dénonciations qu'on a portées.

Il n'y a plus de doute quant à la crédibilité de l'Association: on n'a pas fait de campagne de peur comme pouvaient le prétendre Monsieur Denis de Belleval, Madame Noël et Jacques Jobin ! Il faut se rappeller que Madame Noël et Monsieur Jobin disaient l'an passé que notre service d'incendie était supérieur aux normes ! Je ne comprends pas qu'on est obligé à l'avenir d'investir près de 50 millions de dollars pour mettre à jour un service qui était au-dessus des normes !

Il ne faut pas oublier également qu'il faut soustraire à cette somme le 20 millions d'économies qu'on fera en véhicules parce qu'on revient à un système pompe et échelle qui va être moins coûteux que le système pompe-échelle et mini-pompe. Donc, c'est moins pire que prévu finalement.

Comment ça va? On est heureux présentement de la façon dont se déroulent les choses et on est en bonne position pour faire face à la musique au cours des prochains mois. Si du côté de la Ville, on veut régler les problématiques pour mettre un terme à toute cette histoire-là et tourner la page de manière définitive et regarder l'avenir de façon un peu plus rose, je pense qu'elle est en mesure de la faire.

Sinon, on va se retrouver dans une situation où les élections municipales s'en viennent et c'est clair que si nous voyons que nous sommes pour être en situation de problématique importante, qu'on ne veut pas améliorer le Service comme on l'a déjà promis à la population, c'est clair que les pompiers de Québec vont participer de façon active à la prochaine campagne municipale, çà c'est certain.

C. T. : Joyeux Noël !

P. P. : Merci beaucoup, toi aussi Christian !

 

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