Texte et photos:: Sylvain Fiset (coll. spéciale)
Talcahuano est une ville située dans la 8ième région, au Chili. D'après le recensement de 2002 selon Wikipédia, elle compte 163 628 habitants. C'est le premier port militaire et industriel du Chili, mais aussi le premier port de pêche ; la ville fait partie de la conurbation de Concepción.
Au Chili, tous les pompiers sont des hommes et des femmes volontaires. Ils
ne reçoivent aucun salaire pour leur travail et n'ont aucune assurance.
Et ce, quel que soit le poste occupé par le pompier. Même ceux
des plus grandes villes comme Santiago qui compte près de 6 millions
d'habitants.
Chaque caserne est organisée par compagnie. Donc, au lieu de les nommer
caserne 1, ils se nomment compagnie 1. Les membres de chacune d'elles sont
responsables du financement et de l'achat de l'équipement. Durant l'année,
ils organisent des activités de subvention pour pouvoir acheter un
nouveau camion, des nouvelles bottes, des nouveaux casques, des nouveaux habits
de combat: présentement, la Ville de Québec est dans un
processus de donation du matériel ne répondant plus aux normes
canadiennes avec la 8ième compagnie des pompiers volontaires de Talcahuano.
Dans cet article, je ne traiterai que du fonctionnement des pompiers de Talcahuano
puisqu'il peut y avoir quelques légères différences avec
les autres services du pays.
Pour assurer sa protection, la Ville de Talcahuano compte dans ses rangs
plus de 600 pompiers volontaires répartis dans 10 compagnies. Donc,
en moyenne, chaque compagnie est constituée de plus de 60 pompiers.
La compagnie 5 compte à elle seule plus de 100 pompiers. Elle est l'une
des plus riches et obtient une partie de son financement du quartier Allemand
de la région. Ses membres proviennent tous en général
de cette communauté. Suit ensuite la compagnie 4, aussi affiliée
à la communauté italienne du secteur. Sur les véhicule,
on peut y même y lire «Vigili del fuoco», pompier en italien
au lieu de «bombero», la version espagnole. Les pompiers de cette
compagnie portent tous fièrement le casque italien qui est une version
améliorée du casque f1 de Gallet. Il y a aussi une autre compagnie
affiliée à la communauté Belge. Pour les autres, n'étant
affiliées à aucune communauté étrangère,
le financement étant plus difficile, elles organisent des activités
comme des bingos une fois par année en espérant que ce soit
assez pour subvenir à leurs besoins jusqu'à la prochaine activité
de financement. À la 8ième compagnie, on avait lancé
l'idée d'un casino à l'intérieur des murs de la caserne.
Après quelques années, le financement n'étant pas rentable,
on a dû abandonner l'idée.
Au niveau du corps de pompiers, l'organigramme est constitué des niveaux
suivants : Superintendant, Vice-superintendant, Commandant, Commandant
second, Commandant troisième, Secrétaire général,
Trésorier général et Aide général des commandants.
Au niveau des compagnies : Directeur, Secrétaire, Trésorier,
Capitaine, 4 lieutenants et un aide.
Les postes sont attribués par vote une fois par année.
Tous les membres du service, du pompier au Superintendant, ont droit de vote.
Un pompier peut passer de simple volontaire à Commandant ou de Commandant
à volontaire d'un jour à l'autre. Par contre, seulement ceux
qui ont accompli le nombre d'années requis au sein du service et qui
ont accompli la formation nécessaire peuvent poser leur candidature.
Pour devenir pompier, chaque postulant doit avoir réussir une
formation à ses frais. Il faut pouvoir être disponible une semaine
de garde de nuit obligatoire toutes les 3 semaines de façon à
ce qu'il y ait toujours des pompiers en caserne la nuit, 7 jours sur 7, 365
jours par an. Si le volontaire ne répond pas aux exigences, il peut
être renvoyé sans préavis à tout moment. Il doit
se prémunir de gants de combat, de cagoule et de bottes de combat à
ses propres frais. L'habit de combat et le casque sont fournis par la compagnie.
Après 25 ans de service, il est dispensé de garde obligatoire.
Donc, être pompier au Chili n'est pas un travail : il s'agit plutôt
d'une passion.
Le seul pompier salarié est le Cuartelero, l'opérateur de la
pompe. Au Chili, il n'est pas considéré comme étant pompier.
Il vit avec sa famille dans une maison annexée à la caserne
et doit obligatoirement être chez-lui du lundi au vendredi, nuit et
jour, prêt à conduire la fourgon pompe à l'adresse de
toute intervention. La fin de semaine, c'est un volontaire qui assume cette
responsabilité. Donc, s'il doit se déplacer pour quelque raison
que ce soit pendant la semaine, il doit le faire avec le fourgon- pompe.
Lors d'un appel, les pompiers se rendent directement à l'adresse avec
leur propre moyen. Ceux qui n'ont pas de voiture et qui vivent sur le chemin
entre la compagnie et l'incendie sont pris sur le pouce par le fourgon.
La compagnie est en fait un club social où on peut y retrouvrà
toute heure de la journée les volontaires et leur famille. À
tous les jours, quelques membres se réunissent pour manger à
la caserne. Des activités sont organisées pendant toute l'année.
Les volontaires sont très attachés à leur compagnie.
C'est leur famille.
8ième compagnie:
Chauffage principal
La maison du Cuartelero de la 8ème Compagnie
Le fondateur de la caserne
Pompiers décédés au combat
Accident de la route
9ème Compagnie
5ème Compagnie (allemande)
4ème Compagnie (italienne)
Mannequin de pratique
1ère Compagnie
Véhicule de recharge de bouteilles d'air
2ème Compagnie
Véhicule d'évacuation et sauvetage GRIMP
3ème Compagnie
Véhicule premiers répondants, 3ème compagnie
La Grande Séduction :
Étant au Chili, les 16 et 17 juin dernier, je me suis rendu jusqu'à
Talcahuano pour rencontrer les responsables de la 8ième compagnie dans
le but de trouver une façon d'envoyer l'équipement périmé
que nous avons présentement au Service. J'y ai vécu «La
Grande séduction». En deux jours, j'ai eu la chance de visiter
plusieurs casernes; visiter la plus grande usine de fabrication d'acier du
Chili, troisième en Amérique du Sud; rencontrer les dirigeants
du service d'incendie; faire une garde et répondre aux appels de la
8ième compagnie et même de participer à une intervention ;
être invité à un «asado», BBQ, organisé
en l'honneur de ma visite où l'on m'a remis une plaque soulignant l'évènement;
faire une visite guidée de la ville et de ses limites; manger dans
un restaurant les meilleurs plats typiquement chiliens de la région
et pour finir, amené avec le fourgon- pompe jusqu'au terminal d'autobus
et escorté, sirène et gyrophare allumés, jusqu'à
la sortie de la ville.
Ce que m'a le plus marqué lors de cette visite est la fierté et la passion avec laquelle tous les volontaires font leur travail sans rémunération. Malheureusement, de nos jours dans la réalité québécoise, les négociations auxquelles nous devons faire face tous les trois ans, amenuisent la fierté et la passion que nous avons à faire notre métier.
ASADO à la 8ème compagnie
L'aîné des volontaires de la 8ème Compagnie
J'ai une amie volontaire au sein de la 8ième compagnie. C'est de cette
façon que j'ai pris contact avec les dirigeants du service des incendies
de Talcahuano. Étant seule avec le Cartero à répondre
à incendie et voulant sauver un enfant pris à l'intérieur
par l'élément destructeur, elle a pris des risques que nous
calculerions d'inutiles et s'est brûlé les deux mains au 2ième
degré. Heureusement, aujourd'hui elle est toujours en mesure de faire
son travail. L'année passée, 2 pompiers sont décédés
dans la ville voisine pour des causes similaires. Le taux de décès
chez les pompiers est beaucoup plus élevé que chez-nous.
Si je compare les deux structures, malgré la bonne volonté des
volontaires chiliens, la structure nord-américaine est plus efficace
à répondre rapidement aux appels dans des délais convenables.
Là-bas, la vie d'une personne menacée par un événement
critique repose entre les mains de la possibilité des autres à
répondre.
Sylvain Fiset
Pompier caserne 9, équipe 2
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